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ODD, respect des Droits Humains et devoir de vigilance, au programme de la rencontre du groupe de travail du C3D « Droits Humains »
Le mercredi 23 novembre 2016, le groupe de travail Droits Humains, piloté par Christine Bargain (Directrice RSE du Groupe La Poste), accueillait Anthony Ratier (Chargé de mission Droits Humains et ODD au Global Compact France). Fort de son expertise, Anthony Ratier a présenté aux membres du C3D les 17 Objectifs de Développement Durable (ODD) et la place très importante qu’y occupent les Droits de l’Homme.
Les ODD s’appuient sur de nombreux textes fondamentaux : la Charte des Nations Unies, la Déclaration universelle des Droits de l’homme, les instruments internationaux relatifs aux Droits de l’Homme et la Déclaration sur le Droit au Développement. Avec ses 169 cibles, les ODD concernent beaucoup de sujets et font références à de nombreux autres « droits » déjà établis et reconnus par des textes et traités internationaux : droit à un salaire décent, droit à la protection sociale, droits égaux des femmes dans la vie économique, droit à une alimentation saine, droit à la santé, etc.
« Les Droits de l’Homme et des textes de référence sont au cœur des ODD et irriguent la plupart des 17 objectifs » A. Ratier
Comme l’a indiqué Anthony Ratier, de par cette antériorité de textes, beaucoup d’entreprises répondent déjà à plusieurs ODD et sont en phase avec certaines « cibles ».
A travers le balayage de ces objectifs planétaires qui fixent un cap jusqu’à 2030, les membres du groupe ont échangé sur des actions menées par les entreprises permettant de renforcer les droits des salariés et de prévenir des risques d’entorses aux droits humains. Dans les discussions au sein du groupe, a été abordé le sujet des systèmes d’alerte interne. Un membre du C3D ajoute qu’il est important de mettre en place des dispositifs de contrôle et d’alerte à l’extérieur, dans les pays à risque notamment, en mesure d’intercepter des « signaux faibles », pour détecter des anomalies et intervenir avant qu’un problème limité ne prenne de l’ampleur et puisse déboucher sur une controverse de grande ampleur, avec une forte atteinte à la réputation de l’entreprise. Autre question : quelles garanties pour les lanceurs d’alerte qui dénonceraient des abus, des infractions, constatés par exemple chez un fournisseur, dans la chaîne de sous-traitance ?
Quels dispositifs d’alerte mettre en place, notamment pour les pays à risque, pour détecter des signaux faibles et des menaces d’atteintes aux droits humains ?
Les échanges à propos de l’ODD 8 et le « travail décent » ont par ailleurs permis d’évoquer certaines démarches volontaires vertueuses, comme celle de la grande distribution et des groupes Carrefour et Auchan autour de l’ICS (Initiatives Clauses Sociales). De fait, suite au Rana Plaza, plusieurs entreprises ont pris les devants et ont mis en place des démarches de vigilance, y compris avec des outils mutualisés au sein d’un secteur professionnel, par exemple l’Alliance pour la sécurité des travailleurs bangladais qui regroupe de nombreux distributeurs américains et surtout l’Accord Fire & Building Safety du 13 mai 2013 qui réunit plus de 200 grandes compagnies (principalement européennes), les plus grandes fédérations syndicales sectorielles (IndustriALL Uni Global Unions) avec le soutien de la société civile (Clean clothes campaign).
A l’ordre du jour également, la Loi sur le devoir de vigilance qui continue à interroger les entreprises : le 29 novembre, les députés ont approuvé en nouvelle lecture cette proposition de loi mais il faudra encore une navette avec le Sénat, mi-janvier 2017, avant son adoption définitive prévue à la Chambre des Députés en février. Les interrogations des participants portaient notamment sur ce que seront réellement les obligations liées aux plans de vigilance, sur leur intensité, leur complexité, les moyens qu’il faudra mobiliser pour les élaborer et les risques juridiques encourus s’ils n’étaient pas conformes ou assez complets par rapport à ce qu’exigera finalement la loi.
Les entreprises s’interrogent toujours sur ce que seront les plans de vigilance exigés par la future loi sur le devoir de vigilance
Sur les liens entre les ODD et les futurs plans de vigilance, Christine Bargain précise que l’on ne se situe pas tout à fait au même niveau : « Les ODD sont d’abord des objectifs, offrent un panorama global de buts généraux, mais ne constituent pas un outil opérationnel en soi. Le Plan de vigilance, tel qu’il est envisagé à l’heure actuelle, se rapproche lui d’un dispositif d’analyse et de maîtrise des risques, notamment par rapport à la supply chain. »
Le point soulevé par certains membres du C3D est aussi de savoir s’il n’y a pas aujourd’hui trop de textes, trop de référentiels, trop d’outils susceptibles d’orienter (ou de désorienter ?) et guider les stratégies RSE des entreprises. Entre des référentiels globaux, des principes mondiaux auxquels on adhère, les exigences de reporting et les demandes d’agences de notation, les textes et outils abondent pour guider la stratégie RSE. Entre l’ISO 26000, le Global Compact, certains outils de reporting exhaustifs (GRI 4), les exigences renforcées du reporting Grenelle (voir l’article du C3D) et maintenant les ODD, plus que jamais, la question se pose aujourd’hui de créer davantage de convergences, des synergies et une simplification pour éviter d’être noyé sous les cibles, sous les données à fournir et les réponses à apporter à différentes parties prenantes. C’est d’ailleurs pour faciliter ces convergences que Global Compact France a conçu et mis en ligne un tableau de correspondance entre les ODD et les Principes du Global Compact des Nations Unies.
Créé il y a plus de deux ans, et tandis que l’on a jamais autant parlé de la question des Droits de l’Homme en entreprise, le groupe de travail Droits Humains du C3D continue son exploration de ce sujet stratégique que la Loi sur le devoir de vigilance va de nouveau mettre au premier plan en 2017.
Retrouvez les travaux du Global Compact France sur les ODD et la page du Club Droits Humains du Global Compact France.