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La RSE philanthropique à travers des partenariats avec l’ESS : 5 questions à Ségolène de Montgolfier, directrice RSE chez Evolem
Quels sont les enjeux de la philanthropie en entreprise ? Comment créer des partenariats innovants avec le monde de l’Économie Sociale et Solidaire ? Comment intégrer cela dans sa politique d’achats responsables ? Retour d’expérience avec Ségolène de Montgolfier, Directrice RSE chez EVOLEM.
Comment la philanthropie s’intègre-t-elle à la stratégie RSE ?
Notre démarche philanthropique se décline par la création, l’accompagnement et le soutien d’initiatives à but non lucratif à fort impact. Nous nous concentrons sur un nombre limité de projets afin d’être dans une relation partenariale de qualité favorisant leur développement. Cette approche est alimentée par l’ADN entrepreneurial d’Evolem et de notre fondateur Bruno Rousset.
Pour nous c’était un axe très important dès l’origine, finalement préalable à la démarche RSE : nous avons en fait démarré notre vision RSE par la philanthropie. L’activité philanthropique fait partie intégrante de l’activité de l’entreprise, avec une équipe et un budget dédié, ce n’est pas un sujet annexe. Un premier fonds de dotation a été créé en 2014 et un deuxième en 2020.
L’accompagnement des associations alimente la stratégie RSE ! Le travail fait avec elles aide à éveiller, acculturer et conscientiser les esprits sur de nombreux sujets : égalité, inclusion, diversité, environnement…
Le reste de la démarche RSE a suivi, avec l’avantage d’être une entreprise familiale, donc amenant une facilité pour porter le sujet en interne. Nous sommes maintenant en phase de structuration pour porter une vision stratégique 2030. Nous travaillons sur le plan d’action et les objectifs en ce moment, en lien avec notre raison d’être et 4 objectifs de développement durable sur lesquels nous estimons avoir un véritable effet levier : éducation de qualité, inégalités réduites, consommation et production responsables, travail décent et croissance économique.
La stratégie RSE s’applique à l’ensemble de nos actifs financiers : investissements, immobilier, placements et philanthropie. Nous avons un suivi dédié autant aux entreprises dans lesquelles nous investissons qu’aux associations soutenues et partenaires.
Nous avons défini quelques indicateurs de suivi transverses qui s’appliquent tant en interne qu’avec nos parties prenantes : l’effort de formation, la création d’emplois de qualité, l’égalité salariale, le partage de la valeur, l’intensité carbone. Nous regardons également le nombre d’initiatives financées qui contribuent via leur objet social/mission à l’un des ODD.
Aujourd’hui, nous sommes dans une phase de diagnostic et de mesure, afin d’établir des trajectoires de progrès adaptées à nos différents actifs financiers.
L’ensemble des collaborateurs sont impliqués dans la mise en oeuvre de la stratégie RSE, via les feuilles de route ESG définies pour chaque activité. Ils sont acculturés, formés, outillés et mobilisés sur les objectifs ESG (notamment via l’intéressement). L’aspect extra financier est partie intégrante de l’activité, nous veillons à ce que la performance extra-financière fasse partie intégrante de la stratégie de développement.
Votre philosophie de philanthropie se décline aussi en mécénat de compétences, comment cela se traduit-il à l’interne ?
Ce type de mécénat est en quelque sorte un don en nature : nous mettons nos collaborateurs, qui vont mobiliser pendant un temps leurs compétences ou leur force de travail, à disposition des associations. Les collaborateurs EVOLEM s’engagent et mettent leurs compétences (stratégie, finance, communication…) au service des projets soutenus pour affirmer nos valeurs citoyennes.
Le mécénat de compétences est basé sur le volontariat, mais est porté par la gouvernance et le management. Il est animé par l’équipe en interne pour inviter les collaborateurs à donner de leur temps, et à faire part des besoins des associations. Nous organisons régulièrement des événements de rencontres entre associations et collaborateurs pour faciliter le lien et comprendre les besoins.
Nos axes d’intervention sont l’insertion professionnelle des jeunes et la lutte contre la précarité, et l’environnement que nous adressons depuis 2 ans via un fonds de dotation dédié. Nous avons beaucoup développé l’insertion des jeunes, grâce à un réseau ancré localement et du tutorat de la part de nos collaborateurs. Nous apportons aussi un mécénat plus stratégique, axé sur la bonne gestion et structuration d’une association. Cela dépend de l’envie et des compétences de chaque collaborateur, à adapter aux besoins des associations.
Notre offre d’accompagnement extra-financier peut aller au-delà du mécénat de compétence avec un apport de conseils sur des thématiques comme la gouvernance, les RH, etc. Le tout est de trouver le bon équilibre entre les besoins et les compétences.
Et nous réalisons qu’en s’ouvrant à l’ESS cela a fait changer la vision qu’avaient les collaborateurs de l’associatif !
Vous avez deux fonds de dotation : comment cela fonctionne-t-il ?
Nous avons en effet deux fonds de dotation : Evolem Citoyen et Domorrow. Ce sont nos organismes de mécénat, co-fondés par l’entreprise et des membres de la famille. C’est l’équipe RSE/philanthropie d’EVOLEM qui gère le sourcing, l’analyse et le suivi des projets (une équipe de 4 personnes). Pour chaque fonds de dotation nous avons une instance de gouvernance : la famille est impliquée dans les choix stratégiques. La transversalité est très importante, et les sujets philanthropie sont régulièrement partagés avec les autres équipes et collaborateurs.
Comment se sont fait les choix de thèmes d’actions philanthropiques ?
Au départ ils ont été impulsés par la famille, par exemple pour la précarité qui est un sujet leur tenant à cœur. La création d’un fond de dotation a ensuite structuré l’ambition, avec le questionnement du positionnement de l’entreprise au global.
Nous avons organisé un séminaire philanthropie, impliquant le conseil de surveillance et le CODIR, et mené une enquête auprès des collaborateurs afin de déterminer les axes prioritaires. Il était nécessaire que la vision de l’entreprise soit portée en interne, pour partir sur de bonnes bases.
Les sujets de précarité et d’insertion sont donc liés à l’ADN de l’entreprise, car nous sommes concernés par le développement de PME, l’investissement et l’insertion.
La question de l’environnement, plus récente, a été impulsée par les enfants de la famille, donc grâce à la génération suivante. La continuité est aussi une clé dans nos ambitions philanthropiques, qui s’inscrivent dans la transition écologique et solidaire.
Tout ceci alimente ensuite la stratégie RSE pour accélérer l’aspect environnemental et notre impact positif.
Comment se traduit votre partenariat avec l’ESS au niveau de vos achats ?
Pour nous, le mécénat et les achats responsables sont les deux axes forts de soutien au secteur de l’ESS. Les 4 ODD que je mentionnais plus tôt, se retrouvent dans les critères de nos fournisseurs et prestataires, donc l’aspect sociétal et environnemental. Notre réflexe est de systématiquement chercher dans le milieu de l’ESS pour nos achats, car les associations ont aussi des ressources propres et des services, qui permettent de créer ce lien avec les entreprises. Dans le cas d’un appel d’offres, c’est une réponse commune aux offres publiques : doubles compétences et partenariats innovants.
Si nous organisons une journée de solidarité, nous finançons la prestation de services à une association. Par exemple, nos collaborateurs de notre structure d’investissement ont participé pendant une journée à une immersion dans l’univers de la menuiserie-ébenisterie, à la rencontre des menuisiers et des artisans-apprenants de l’Atelier Emmaüs, projet par ailleurs soutenu par notre fonds de dotation.
Et au-delà des achats et du mécénat, la joint venture sociale est aussi un format très innovant de pont entre entreprise et ESS, je pense que c’est quelque chose qui se retrouvera de plus en plus dans les modèles économiques dans les années à venir.